Le Papagallo, superbement hors-jeu

Publié le par Etienne Balmer

 
Nous sommes en 2006. Toute l’Alsace est occupée ce soir par le quart de finale de la Coupe du monde de football entre la France et le Brésil. Toute ? Non ! Un bar peuplé d’irréductibles Haguenoviens résiste encore et toujours à l’envahissement du ballon rond : bienvenue au Papagallo.
 
Haguenau, samedi 1er juillet, 21 heures. La place de la mairie est déserte. Le bar du Papagallo est vide, lui aussi. Son ambiance « lounge » et les lumières tamisées sont pourtant agréables, à l’image de Patrick, le patron, et de sa serveuse Cathy, toujours souriante. La vérité est ailleurs : ce soir, la France et le Brésil s’affrontent pour un ticket en demi-finales de la Coupe du monde de football en Allemagne. « Notre chiffre d’affaire a chuté dès le premier soir du Mondial », explique Patrick d’un air fataliste. Pas question pour autant d’installer un écran géant au Papagallo pour retransmettre les matches en direct. « Quand j’ai monté le commerce il y a six ans, je n’avais pas l’intention de faire un bar des sports », continue Patrick, pour qui « il n’est pas question de trahir une ambiance pour une mode ». Cathy, debout derrière le bar, opine de la tête. Comme Patrick, elle avoue suivre parfois « des bouts de rencontres », afin de ne pas avoir « l’air idiote » devant les amis ou les clients.
 
Peu avant la mi-temps, le portable de Patrick sonne. C’est sa femme, qui suit le matche à la maison avec sa sœur et sa mère, bières à la main. Depuis le début de la Coupe du monde, la femme de Patrick s’est découvert une passion pour les Bleus, qui laisse son mari indifférent. « Moi je suis d’origine italienne, alors s’il y a une équipe que je supporte à la rigueur, c’est bien la Squadra Azzura », explique Patrick. Quelques compères débarquent ensuite au Papagallo. Christophe, le portier, est accompagné de son ami Michaël. Le football ? « On s’en moque », affirment-ils en chœur. « Je ne vois pas ce qu’il y a d’intéressant à suivre devant sa télévision des types courir après un ballon », ironise Michaël. Deux jeunes clientes, fraîchement arrivées sur la terrasse du bar pour « Fuir le Mondial » poussent la plaisanterie : « On a qu’à donner un ballon à chaque joueur, comme ça ils seraient tous contents ! ». Décidément, la magie du football n’opère pas au Papagallo. Mais à voir tout ce petit monde passer une soirée paisible entre amis et cocktails, peut-on réellement le leur reprocher ?

Publié dans Mon ADN aux DNA

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